Néant et Passage

Néant. Lorsqu’on y repense, c’est un mot pour le moins étrange. En effet… Qu’est-ce donc, le néant ? Le vide ? Oui, et ? Néant… A vrai dire, je ne crois même pas qu’il ait une définition « complète ». Ca m’étonnerait, vraiment. Et pourtant, ce mot m’intrigue.
J’aimerais savoir ce qu’il veut dire, vraiment.
J’aimerais pouvoir le comprendre, et percer son secret. Mais est-ce possible ? Et en a-t-il vraiment un ?

« - Shane, ça a sonné, lèves-toi…
- Allez, bouge, on va pas rester là 3 heures, en plus la prof est furax !
- Hmmm… ? »

Dans une sorte de grognement – à ma façon -, j’émergeais.
Comme la plupart du temps quand je me réveillais, je me sentais… perdu. Je ne savais jamais où j’étais en fait. Même quand j’étais dans mon lit.

« - Allez Shane, lèves-toi !
- Gwé ? On est où ?
- J’avais oublié ta magnifique lucidité au réveil.
- On est où ?
- Au collège. En salle 25 plus précisément.
- Et si tu t’bouges pas, on va s’faire tuer par la prof.
- Pourquoi ?
- Elle en peut plus que tu dormes en cours.
- Hein ?! Je dormais ?! C’était qu’un rêve ?
- Quoi ?
- Heu… Nan rien… Désolé… »

Je regardais par la fenêtre, rêveur, avant qu’une voix froide et calme – mais énervée à sa façon – ne nous fassent sursauter.

« - Dites moi vous trois, désirez-vous une heure de retenue pour vous faire comprendre que je ne souhaite pas votre présence dans ma salle de cours plus de 5 minutes après la sonnerie ? Quand à vous, Mr. Ensen – elle tourna son regard vers moi –, je devrais vous rajouter une seconde heure de retenue, pour vous apprendre à dormir durant mes cours. Seulement, je saurai me montrer clémente… pour cette fois, et à condition que vous ayez quittés ma salle de cours avant les 3 prochaines secondes. 1… »
Je n’eus pas le temps de réagir que, déjà, BJ et Lore’ me trainaient hors de la salle, ne laissant même pas le temps à la prof’ de dire le « 2 ».

« BJ – Rhaa, que j’aime pas cette prof’ !
Lore’ – Courage, plus qu’un an à la supporter…
Shane – On est des héros… On l’aura supporté 4 ans quand même.
BJ – 5 ans pour moi… J’en reviens pas qu’y ait que cette prof en physique. »

Bon, je vais vous épargner la suite de cette conversation… passionnante en nous présentant :
A ma gauche, beau et grand garçon de 16 ans, injustement traité de « so rebel » dût à ses notes – qu’on ne peut pas qualifier de bonnes – et au fait qu’il aime avoir l’air d’un vampire aux allures de noble. Véritable tombeur des filles (mais on les comprend…). J’ai nommé… Billie-Joe Etfoot ! (Ses parents devaient aimer Green Day, on n’a jamais sut).
A ma droite, belle jeune fille de 14 ans de taille moyenne, surnommée d’intello’ par les mauvaises langues dût à ses résultats qu’on peut sans problème qualifier de bons – voir très bons -, oui, vous avez bien compris, je parle de… Lorelaï Roumenov 1 !
Quand à moi, Shane Ensen, je suis un garçon de 15 ans aimant jouer de mon androgynie. Je suis surnommé (toujours par le même groupe de gens que BJ et Lore’), dût à…

« - Tiens, mais c’est le so rebel, l’intello’ et la fausse fille !
Shane – Fausse fille ?
- Mais t’es vraiment idiot en plus d’être une fausse fille – et pire, te prendre pour une fille ! – et une tapette… Tu fais vraiment honte aux vrais hommes !
BJ – T’aurais pas un côté macho toi ? »

Je vis Billie-Joe fixer le groupe devant nous d’une façon que je ne voyais que chez lui. Il les fixait d’un regard froid, et pourtant inexpressif à la fois. Regard d’ailleurs augmenté par ses yeux incroyablement sombres et perçants.
Enfin, ce groupe de gens en face de nous était plus souvent appelé « la bande de John ». Inutile de dire pourquoi j’imagine. Ils ne nous ont jamais aimés, c’était réciproque. Sauf qu’avec eux dans les parages, on passait jamais inaperçues dans les couloirs. Parfois, on arrivait même à faire sortir les prof’s de leur classe.

« John – C’est toujours mieux qu’être une tapette ! »

Me doutant de ce que serait la réaction de BJ, et le voyant serrer son poing, puis commencer à avancer, je me ruai sur lui pour essayer de le calmer.

« Shane – Arrête BJ, entre pas dans son jeu ! Il en meurt d’envie, il sait qu’ça pourrait te faire avoir un revoie temporaire… ou… plus…
BJ – Mais ça devient homophobique ! J’vais pas le laisser insulter un d’mes meilleurs amis sans rien faire !
Shane – Mais j’m’en fiche de ça ! J’y suis habitué !
Lore’ – Il a raison Billie-Joe, ça sers à rien. Allez, venez, ça pue ici. »

Je suivis Lorelaï, traînant un peu BJ lorsqu’il refusait d’avancer.

« Shane – Dites… Pourquoi fausse fille ?
BJ – Hein ?
Shane – Il m’a appelé fausse fille…
Lore’ – Tu ressembles à une fille ?
Shane – Oui… Enfin je crois, parfois…
Lore’ – Tu es un mec ?
Shane – Oui.
Lore’ – T’as ta réponse. »

Un léger silence se passa (durant lequel je sentis BJ essayer de se calmer), après quoi je vis un large sourire se dessiner sur ses lèvres, puis il me fixa d’un air que je n’aimais pas.

« BJ – Dis Shane… C’était quoi ton rêve en physique ? Il devait être vachement bien pour que tu mettes autant de temps à te réveiller… »

J’entendis Lorelaï soupirer, tandis que je me remémorais mon rêve… C’est vrai qu’il semblait si réel… Je me demandais même si… Si je ne bougeais pas vraiment… Moi… Comme si… Comme si j’étais dans le rêve, avec ma conscience et tout.

Pourtant ce n’est qu’un rêve… Je crois ?

« BJ – Allez, c’était quoi ton rêve ?
Lore’ – Tu veux pas le laisser un peu avec ça ? »

J’entendis Lorelaï pousser un énième soupire d’exaspération, lesquels se confondaient parfois aux miens. Ca faisait depuis le matin – plus précisément un peu après le cours de physique – que Billie-Joe faisait tout pour que je le lui dise.

« BJ – Je sais ! T’as rêvé de Jean-Baptiste, ce beau nouveau français là ! »

Je rougis légèrement.

« Shane – Mais non, qu’est-ce que tu t’imagines encore ! >____<
BJ – Ah, tu rougies ! C’est la preuve !
Shane – Mais non ! J’ai juste fais un rêve que j’croyais vrai.
Lore’ – Il se passait quoi dedans ?
Shane – J’sais plus trop… »

La sonnerie retentit, nous coupant dans notre discussion. Ce fut d’ailleurs la première fois que je bénis la cloque lorsqu’elle annonçait un début de cours.

Une heure plus tard, la sonnerie retentit de nouveau, signant la fin des cours, et donc 16h30. Habitant pas loin du collège, je quittais Lorelaï et Billie-Joe pas longtemps après être sortit, tandis qu’eux allaient prendre leur bus.

Noir. Irrémédiablement noir. J’avais beau courir de long en large. Et plus je courrais et cherchais, plus j’étais pris d’angoisses. Cet endroit… C’était comme si j’avais atterrit dans le néant… Néant… Ce mot augmentait en moi l’angoisse déjà grande. Et personne qui ne répondait à mes appels… Comment voulez-vous ne pas avoir peur ?

Je me réveillais en sursaut, et essoufflé, comme si j’avais courut un marathon. Je regardais autours de moi, ayant peur de ne pas revoir ma chambre, mais elle était bel et bien là et, pour moi, le noir qu’il y avait en raison de la nuit encore présente était réellement très rassurant. Reconnaître les meubles m’entourant avait un effet bien plus rassurant que je ne l’avais toujours pensé.

Au bout de quelques minutes, je me décidais finalement de me recoucher, bien que peu rassuré à l’idée de retourner dans ce… Néant… Rien que le nom me donnait froid au dos.
Finalement, je m’endormis, sans re-… rêver (?) du néant.
Car néant, j’avais décidé d’appeler ce lieu ainsi, au cas où… au cas où j’y retournerais. Enfin, si ce n’était vraiment pas un rêve.

Je crois que je deviens fou.